top of page

5 juin 2013, en avion vers Paris

 

Je suis dans l'avion, J'ai décidé de revenir en France. Les événements de ces derniers jours m'ont  écœurée. Je sentais bien que quelque chose se tramait à Istanbul. Je pensais que la communauté arménienne allait protester mais j'étais complètement à côté de la plaque. Ce n'est que mercredi que j'ai appris ce qui suit :

 

En 2011, le premier ministre Recep Tayyip Erdoğan (ne prononcez pas le "ğ") a constitué un troisième gouvernement avec son parti, l'AKP ou parti dit "pour la justice et le développement". Mais ce nouveau mandat, marqué par le conservatisme religieux, l'autoritarisme, les violences à l'égard des kurdes, sans compter la corruption, était loin de plaire à tout le monde. La situation s'est envenimée cette année. L’État voulait mettre en place un projet immobilier faramineux qui prévoyait notamment de détruire le parc Gezi-Taksim pour y installer un centre commercial. Les stambouliotes, déjà excédés par la vente d'un des ponts sur le Bosphore ne l'ont pas accepté.

 

Comme beaucoup d'autres, je suis allée manifester avec Aksel alors qu'on commençait à abattre les arbres du parc. Il y a peu d'espaces verts là-bas et Gezi-Taksim était plus qu'un symbole historique. Historiquement, il représentait le premier espace public de la ville mais aussi un endroit de promenade et de repos pour des foules d'habitants. Apparemment, le tribunal administratif avait refusé cette destruction mais le gouvernement a voulu imposer sa décision par la force. Inutile d'ajouter que je trouvais ça juste de protester. Si j'avais su... Très vite, les forces de police et l'armée nous sont tombées dessus. Dès lors, je n'ai vu que du sang et de la fumée.  Moi je restais plantée là, tétanisée. La dernière image que j'ai en tête, c'est Aksel. Il se faisait embarquer, inconscient, le visage meurtri. Avant qu'elle ne parte, Sevil, une de ses amies, est venue me voir. En larmes, elle me murmura : "Au début, on les avait soutenus car ils avaient promis plus de démocratie; ils disaient qu'ils voulaient mettre fin au pouvoir excessif des militaires. Mais à la place, on a eu une sorte de dictature civile qui se mêle de notre vie privée" (d'après B. GERCE, "Affrontement en Turquie: comment la démolition d'un parc a pu provoquer autant de colère?", L'express, juin 2013). Aux dernières nouvelles, le projet Gezi-Taksim n'a pas été abandonné, juste suspendu.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

C'est donc ainsi que se conclut mon voyage. Un simple coin de verdure peut avoir une grande portée politique. Je comprends mieux maintenant la passion de mon ancêtre pour les jardins arabo-musulmans. Il n'y voyait pas un simple assemblage de fleurs, mais l'expression, par les plantes, de l'harmonie entre les peuples et entre les cultures. 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Manifestation sur la place Taksim, 2013.

 

Destruction d'arbres au Parc Gezi, 27 mai 2013.

 

Pour en savoir plus, vous pouvez consulter : 

Du lieu de vie à la manifestation

Du lieu de vie à la manifestation - Amélia Forestier
00:00 / 00:00
  • Grey Facebook Icon
  • Grey Twitter Icon
bottom of page